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LE 29 MAI, UN AN APRES

Pierre Moscovici
Publié le lundi 29 mai 2006.


Triste anniversaire : il y a un an jour pour jour, 54.67% des français rejetaient le Traité Constitutionnel Européen.

Il n’est pas question ici de remettre en cause leur choix, de refaire le match : les électeurs avaient été appelés à se prononcer lors d’une consultation démocratique, et leur vote souverain s’impose à nous.

Pour autant, le constat un an après est tout sauf réjouissant. Les tenants du non soutenaient que leur position n’était pas celle du rejet et de l’immobilisme, mais du projet et de la relance. Force est de constater que le "non", un an après, n’a pas tenu ses promesses, irréalistes ou mensongères. Les avocats du non n’ont pas été en mesure de proposer une voie alternative, un nouveau souffle, pour l’Union. Il n’y a eu ni renégociation, ni plan B, l’Europe sociale n’a pas progressé, l’influence de la France a reculé. L’essai n’a pas été transformé, et l’Europe peine de plus en plus à trouver l’élan qui la remettra sur les rails, avec des politiques communes privées de moyens.

Certes, l’Europe continue de fonctionner ; mais avec des institutions pensées pour six, dans un club qui comporte aujourd’hui 25 membres. C’est dorénavant avec une Europe qui tourne au ralenti, et qui menace de plus en plus de caler- on l’a vu avec les difficiles négociations sur le budget européen - que nous devons composer, et là est l’immense gâchis.

Le vote des Français, l’année dernière, a porté un coup fatal à la présidence d’un Jacques Chirac déjà très affaibli par les échecs de deux mandats présidentiels ratés. Ne nous en réjouissons pas trop vite : car, par ricochet, le couple franco-allemand s’est trouvé profondément déséquilibré, et c’est ainsi un des moteurs essentiels d’impulsion de la construction européenne qui est tombé en panne sèche - sans que personne n’émerge pour occuper le vide de leadership ainsi dégagé.

Il y a un an, l’Europe était à la croisée des chemins. Pour certains électeurs pro-européens, le non désignait une aspiration, autant qu’un refus. Aujourd’hui, comment ne pas voir que cette aspiration a, elle aussi, été déçue ? C’est dans la mauvaise voie que l’Union s’est engagée, au lendemain du 29 mai 2005 : l’Europe politique n’a cessé, depuis, de perdre du terrain, laissant la voie libre à l’autre Europe, celle d’une Europe de conception plus anglo-saxonne : vaste, libéralisée, sans poids politique significatif. Cette Europe là, ne nous y trompons pas, sera inapte à répondre aux angoisses et aux attentes qui ont été exprimées il y a un an. C’est pourquoi il faut maintenant répondre à ces inquiétudes, et penser enfin une relance européenne qui soit à la fois fondamentale et pragmatique.